Sport, santé et performance, le blog du Dr Fabrice Kuhn

  Les secrets d'un médecin qui pratique le triathlon ironman, le marathon et l'ultratrail et qui a écrit Paléofit, pour booster vos performances

Par Fabrice Kuhn

S'alimenter durant l'effort au cours des entraînements à glycogène bas

S'alimenter durant l'effort au cours des entraînements à glycogène bas

Une nouvelle étude apporte des éclairages intéressants sur l’alimentation à adopter lors d’entraînements à glycogène bas.

Les stratégies d'entraînement à glycogène bas sont clairement efficaces pour améliorer les performances en endurance. Elles sont assez faciles à mettre en place à la fois sportivement et socialement. Il suffit de quelques séances pour en observer les bénéfices (trois séquences peuvent même suffire) et devenir une machine à brûler les graisses.

En revanche, si les modalités de base pour mettre cela en pratique sont identifiées, d'autres modalités de mise en pratique sont possibles. Mais c'est justement ce qui rend ces stratégies accessibles à tous. Chacun peut moduler ces stratégies selon ses besoins et sa réponse à l'entraînement (en termes de performance ou d'organisation personnelle). Bien entendu, il serait encore mieux de tester différentes modalités.

Heureusement la science avance et une étude récente nous apporte des informations supplémentaires, toujours bienvenues. Durant cette étude dix sportifs amateurs (9 hommes et 1 femme) ont suivi un protocole de type "Sleep low training".

L’étude

Il s'agissait d'accomplir un premier effort durant l'après-midi afin d'épuiser les stocks de glycogène musculaire. Cet effort consistait à alterner 2 min à 90% de la PMA (puissance maximale aérobie) avec 2 min de récupération à 50% de la PMA. À partir du moment où le sportif n'arrivait plus à maintenir 90% de la PMA sur 2 min il répétait les mêmes séquences mais à 80% de la PMA et toujours 50% de la PMA pour la récupération. Il passait ensuite à 70% de la PMA dès lors que les efforts  à 80% devenaient trop difficiles. En moyenne les sportifs pédalaient durant 2h pour compléter cet effort.

Le lendemain matin, les sportifs attaquaient deux efforts consécutifs. Le premier durant 1 h à intensité constante (50% de PMA) et enfin un contre-la-montre calibré pour approcher les 40-45 min.

Les sportifs reproduisaient cette séquence à trois reprises dans trois conditions différentes et dans un ordre aléatoire. Quelles que soient les conditions, ils ingéraient 20 g de protéines sous forme de gel (du commerce) juste après le premier effort et juste avant le deuxième effort.

La première condition (CHO) consistait à ingérer, en plus des protéines, 1,2 g de glucides (maltodextrine + fructose) par kg de poids de corps après le premier effort puis 15 g de glucides toutes les 15 min, dès la 30e minute du contre-la-montre.

Lors de la deuxième condition (DELAY) les sportifs ingéraient un placebo après le premier effort puis 15 g de glucides toutes les 15 min, dès la 30e minute du deuxième effort.

Lors de la troisième condition (PLA), les sportifs n'ingéraient que des placebos.

 

Résultats

Première information intéressante à noter, 50% des sportifs se trompaient quand on leur demandait de déterminer la condition dans laquelle ils s'étaient exercés !

Deuxième information, lors de l'effort matinal les taux d'oxydation lipidique ne diffèrent pas selon les conditions en sleep low (PLA et DELAY) et sont bien plus élevés qu'en condition normale (CHO). Même l'ingestion de glucides durant l'effort ne les impacte pas. En clair, si vous faites une séquence d'entraînement à glycogène bas, que vous ingériez des glucides une fois l'effort à glycogène bas débuté ne viendra pas perturber le profil métabolique. En pratique si vous avez un coup de moins bien (hypoglycémie) durant cet effort et que vous ayez besoin d'ingérer un peu de glucides vous ne gâcherez pas le bénéfice de la séance. Ne prenez donc pas de risque si vous vous sentez moins bien.

Troisième information, les performances lors du contre-la-montre ne différaient pas significativement selon les conditions malgré une tendance non significative à la baisse de performances en condition PLA (il existe probablement un biais consécutif au faible échantillon de sportifs).

Quatrième information, nous n'avons malheureusement pas d'informations précises sur les processus adaptatifs qui donnent à l'entraînement à glycogène bas tout son pouvoir pour progresser. Il aurait fallu des biopsies musculaires. En revanche, grâce aux prises de sang nous savons que les taux d'acides gras sanguins sont majorés dans les conditions PLA et DELAY. Elles sont même similaires lors des tests PLA et DELAY. Cela est plutôt prometteur.

Cinquième information, parmi les 10 sportifs 1 seul n'a pas pu finir l'effort dans les conditions PLA (celles typiques d'un entraînement classique à glycogène bas) en raison d'une hypoglycémie. Quand vous faites ce genre d'entraînement n'oubliez pas d'abord d'être progressif et de rester proche du domicile au cas où… et d'emmener un aliment glucidique en cas de besoin. Vous ne gâcherez pas la séance (voir information deux).

 

Mise en pratique

Cette étude va dans le sens que je vous proposais déjà dans "Ultra Performance" à savoir d'allier le bénéfice de l'entraînement à glycogène bas (en l'occurrence le "Sleep low"), de l'entraînement digestif dont je parle aussi dans "Ultra Performance" (ici alimentation durant l'effort) et de pouvoir prolonger un peu la séance débutée à glycogène bas. C'est déjà une stratégie que je vous conseille parfois et que je propose dans certaines séquences décrites dans "Ultra Performance".

 

 

Podlogar T, Free B, Wallis GA. High rates of fat oxidation are maintained after the sleep low approach despite delayed carbohydrate feeding during exercise. Eur J Sport Sci. 2020 Feb 13:1-29.

 

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à propos de l'auteur

Le Dr Fabrice Kuhn est médecin généraliste, diplômé en biologie et médecine du sport. Il est médecin des équipes de France d'haltérophilie. Il pratique le triathlon ironman, le marathon et l'ultratrail.

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