Pour bien démarrer l’année 2015, je souhaite vous raconter une histoire vraie, certes un peu « classique », mais très constructive et qui me permettra de vous faire passer d’importants messages concernant la réussite de toute prise en charge en lien avec le poids.
Allez, je vous amène faire un petit tour dans mon univers, à la fois diététique, social, psychologique mais en lien profond avec l’être humain !
Il était une fois une dame appelée Mme Y, infirmière à la retraite de 62 ans, qui souhaitait se faire opérer d’un by-pass. Après avoir réalisé toutes les démarches et prouvé sa motivation, son rêve s’exauça en novembre 2013. Elle mesurait 1.56m et pesait 99kg, soit un IMC de 40. Cette dame avait de gros ennuis de santé : fibromyalgie, HTA, diabète. Son parcours de vie et de poids semblait somme toute assez banal : 47 kg à 20 ans, traitement hormonaux pour pouvoir tomber enceinte, X régimes avec perte de poids et yoyo, découverte de la fibromyalgie après des années de douleurs non reconnues, prise de poids à la ménopause et malgré un suivi d’un an dans un hôpital public, pas de résultats et une santé qui s’altère.
Lors de notre premier entretien courant 2013, je la découvre drôle, pétillante, motivée mais en souffrance, comme toutes les personnes dans la même démarche. Et je peux vous l’assurer, en tant que professionnels, nous n’avons pas complètement conscience de la souffrance physique et psychologique qu’il existe derrière chacun de nos patients… Nous l’imaginons, la comprenons mais n’en avons qu’une infime idée. Alimentairement parlant, le constat est plutôt correct, avec une (trop) bonne consommation de pain, mais surtout, une problématique de compulsions sucrées lorsque des évènements négatifs se présentent dans sa vie. Partant de là, je lui présente les conseils qu’elle devra suivre après l’opération et lui explique tout ce dont elle a besoin pour cela. Elle semble sous le choc, secouée par tant de « contraintes » auxquelles elle ne pourra échapper si elle souhaite réussir. Cette démarche n’est pas la panacée, elle le sait bien, mais elle accuse le coup et poursuit son bilan préopératoire.
Elle prend le temps de digérer les informations, de les assimiler pour pouvoir les appliquer et l’opération arriva. Aucun problème, elle avait finalement bien mûri le projet et cela s’annonçait idéal. Je l’ai revue 3 fois en 2014 : elle a perdu 25 kg, les traitements médicaux ont été arrêtés car plus de problèmes de diabète ni d’HTA et les douleurs de la fibromyalgie totalement gérables. Elle semble vraiment transformée et profite enfin de la vie, avec toujours la même dynamique et le même sourire que la première fois. A la 3ème consultation, mi-décembre, elle me fait part de son inquiétude. Son poids stagne, elle ne perd plus. Elle est satisfaite mais aimerait encore perdre un peu plus. Le chirurgien est d’accord avec ce fait et lui demande de revenir me voir pour évaluer la situation.
Elle m’explique que depuis octobre elle ne perd plus et qu’elle a recommencé à avoir des compulsions sucrées, chose qui avait disparu depuis 1 an. En creusant le sujet, elle finit par m’avouer qu’elle rencontre des problèmes familiaux, que cela génère de l’anxiété et que le seul moyen qu’elle connaisse pour apaiser ses tensions intérieures réside dans les douceurs sucrées… Comme par magie, malgré 1 an de suivi et d’implication, la problématique alimentaire est revenue en force parce qu’elle n’a pas été travaillée. Après l’avoir laissée parlé pour se décharger un peu, je lui recommande d’aller consulter un psychologue près de chez elle pour apprendre à fonctionner autrement, à enfin gérer ses émotions négatives pour pouvoir continuer son si joli chemin.
Je la reconvoque pour mi-janvier. Poids idem, situation idem. Elle n’a pas pris rendez-vous chez le psychologue… Elle me dit aller un peu mieux mais les compulsions sont toujours là, tapies dans l’ombre, prête à ressurgir à la moindre agression extérieure… J’insiste, je lui fais bien comprendre qu’elle n’est pas sur la bonne pente et qu’elle doit se faire aider si elle veut vraiment s’en sortir et réussir pleinement. Elle accepte et me demande un courrier pour aller voir la psychologue de son village, qu’elle connait de réputation.
Va-t-elle vraiment y aller ? Je le lui souhaite car, pour moi, au demeurant, cela ne va pas me changer la face du monde si elle ne m’écoute pas ! La seule limite de mon travail de "rééducateur de santé" s'arrête bien là et heureusement : ne pas pouvoir faire à la place de mes patients qui restent responsables d'eux-même et de leur réussite! Alors j’en profite pour vous dire, patients obèses opérés ou en cours de bilan bariatrique, mais aussi à tous, quelle que soit la problématique diététique de base : lorsqu’un professionnel de santé vous annonce qu’un travail psychologique est nécessaire pour avancer, ce n’est pas CONTRE vous mais POUR vous. Bien sûr que cela est difficile à entendre, à accepter, à digérer. Travailler sur soi, son comportement, son intériorité, demande du temps, de l’implication, de l’énergie. Mais cette action difficile mène quelque part, là où il fait bon vivre avec soi-même et les autres, sans stress, sans souffrance inutile, sans trouble alimentaire. Tout cela implique une certaine capacité au changement pour laquelle nous ne sommes pas tous égaux. Mais pour cela aussi on peut être accompagné par le professionnel que l’on aura choisi, dans divers domaines possibles. Si vous présentez un trouble alimentaire qui n’est pas résolu, vous pourrez mettre en place n’importe quelle « méthode », appliquer n’importe quels conseils (des plus sérieux aux plus farfelus !), cela n’aura pas le résultat escompté ! Jamais ! Et je parle par expérience ! Pas la peine de nous prendre en grippe non plus, cela ne vous avancera à rien et vous resterez en échec de la même manière. Le cas s’est déjà présenté et je reste fermement convaincue que TOUTE LA VERITE EST BONNE A DIRE (avec tact et mesure) du moment qu’elle permet d’avancer vers un monde « intérieur » meilleur !
Ainsi s’achève cette petite histoire… en un « coup de gueule » de début d’année ! D’autres complications ou « demi-échecs » sont possibles et cela me donnera l’occasion d’en parler ultérieurement… A l’occasion d’autres histoires sans doute !