Alzheimer et déclin cognitif

Dr Bredesen : "Le principal signe d'Alzheimer ? La difficulté à s'organiser."

Dr Bredesen : "Le principal signe d'Alzheimer ? La difficulté à s'organiser."

Le neurologue Dale Bredesen préconise le protocole reCODE dès les premiers signes de déclin cognitif. Un protocole qui fait appel à des modifications du mode de vie : alimentation, exercice, gestion du stress, sommeil, relaxation. Il décrit ici les symptômes qui doivent alerter.

Spécialiste d'Alzheimer et de déclin cognitif, le Dr Dale Bredesen est neurologue et chercheur. Il a été chef de clinique en neurologie à l'Université de Californie à San Francisco (UCSF), puis a collaboré avec le Pr Stanley Prusiner, Prix Nobel 1997 à l'Université de Californie à Los Angeles (UCLA). Il a été professeur à UCSF, à UCLA et à l'Université de Californie à San Diego. Le Dr Bredesen a également dirigé le programme sur le vieillissement au Burnham Institute avant de fonder le Buck Institute (Californie).

Dr Bredesen, votre nouveau livre s'appelle Les premiers survivants d’Alzheimer. Pourquoi ce titre ?

Dr Bredesen : Avec le protocole ReCODE, que j’ai présenté dans mes deux premiers livres, La fin d’Alzheimer et La fin d’Alzheimer-le programme, nous voyons les premières inversions de la maladie, nous voyons les premières améliorations de personnes qui avaient un diagnostic d’Alzheimer, nous voyons les premiers survivants. C'est pourquoi j'ai rédigé ce livre, pour leur donner la parole et les faire témoigner.

Comment est construit ce livre ?

Pour ceux qui ne l’ont pas encore lu, la première partie du livre comprend sept chapitres, et chaque chapitre est une histoire écrite par quelqu'un qui a été amélioré par le protocole ReCODE. Il y a beaucoup de points communs dans les premiers symptômes qu’ils décrivent, mais beaucoup les mettent sur le compte du stress ou de l’âge. 

Le protocole ReCODE a-t-il fait l’objet d’essais cliniques ?

Oui. Nous avons publié nos résultats en 2014, 2016, 2018. Dans notre dernier essai de 2022, 84% des personnes améliorent leurs scores. Il est très important que les patients sachent que des solutions existent, qu’il faut agir dès les premiers signes. Or le plus souvent, ils attendent, et leurs médecins leur disent souvent : « vous vieillissez, c’est normal ». Mais il ne s'agit pas seulement de vieillissement ici. Il y a des centenaires en pleine possession de leurs moyens. Or certains patients ont une quarantaine d’année quand ils remarquent que des choses ne vont pas. D'autres, la cinquantaine, la soixantaine ou plus. Il ne faut pas négliger ces signes. Si vous ne pouvez pas vous souvenir des numéros de téléphone ou n’arrivez plus à organiser les choses comme vous le faisiez auparavant, il faut agir.

Quels sont ces symptômes courants qui apparaissent tôt ?

Il en existe deux familles. Il y a une présentation amnésique, qui concerne généralement environ les deux tiers des patients, et une présentation non amnésique. Donc, les amnésiques, ce qu'ils remarquent, c'est que leur mémoire n'est plus ce qu'elle était. Ils oublient ce qu’ils devaient faire. Par exemple, dans le livre, Sally, avait oublié de venir chercher ses petits-enfants à plusieurs reprises. Il s'agit souvent de nouvelles informations. Vous vous souvenez de choses comme le nom de votre professeur de CM2, mais pas de ce que vous étiez censé faire ce matin, ou de ce que vous avez mangé au petit-déjeuner, ou vous oublierez un rendez-vous ou une information que vous venez d'apprendre, ou un nouveau nom, des choses comme ça. Et attendre avant d’agir, c'est comme apprendre qu'une anomalie sur une radiographie pulmonaire est anormale, mais temporiser en se disant qu’elle n’est pas si grosse. 

Et quels sont les aspects non amnésiques ?

Côté non amnésique, il y a tout un ensemble de choses. Ce sont des gens qui auront des problèmes avec par exemple la reconnaissance faciale. C’est le cas de Deborah dans le livre. Elle se rendait à des événements sociaux ou professionnels et était juste horrifiée parce que les gens venaient la voir et elle ne savait pas qui ils étaient, et ils disaient : « Oh, c'était super de te parler l'autre jour », et elle était incapable de reconnaître leur visage. Fait intéressant, après avoir suivi le protocole ReCODE, elle reconnaît maintenant parfaitement les visages.

Un autre problème concerne les calculs. Les patients vous disent qu'ils ont du mal à calculer un pourboire, ou à payer les impôts, tenir une comptabilité personnelle. On peut aussi mentionner la recherche de mots, la perte de vocabulaire. Ainsi, la présentation amnésique est plus liée au lobe temporal, alors que les symptômes non amnésiques le sont plutôt au lobe pariétal. Bien sûr, les scanners PET montrent des anomalies à la fois dans les lobes temporaux et les lobes pariétaux. Donc, cela dépend de celui qui est le plus dominant.

Y a-t-il chez ces personnes un symptôme dominant ?

Le plus important est peut-être la difficulté à s’organiser, ce qu'on appelle le dysfonctionnement exécutif. Donc, je demande toujours aux gens, si vous deviez partir dans une heure et que vous deviez organiser une valise, pourriez-vous le faire ? Et ils diront : « Oh mon Dieu, non, je ne peux plus faire ça ». Ce sont les gens qui perdront leur emploi en premier, parce qu'à leur travail, ils ne peuvent plus s'organiser.

Lorsqu’on regarde en quoi consiste le protocole ReCODE, beaucoup de ce que vous préconisez en termes de changements de mode de vie est susceptible d’avoir un impact non seulement sur la santé mentale mais la santé en général. Est-ce le cas ?

Il y a un effet sur les performances, le retour à un "cerveau normal". Les gens qui le constatent, se disent : "Wow, je ne savais pas ce qui me manquait. Je suis plus rapide, je suis plus vif, je me souviens mieux, j'ai plus d'énergie, je dors mieux." C'est la meilleure nouvelle à ce sujet, à savoir que les effets secondaires de l'approche que nous adoptons améliorent le poids, font baisser la pression artérielle. Beaucoup ont pu jeter leurs médicaments contre l’hypertension, le diabète, leurs statines. Nous conduisons les gens vers une meilleure santé.

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