Sport, santé et performance, le blog du Dr Fabrice Kuhn

  Les secrets d'un médecin qui pratique le triathlon ironman, le marathon et l'ultratrail et qui a écrit Paléofit, pour booster vos performances

Par Fabrice Kuhn

Périodisation de l'apport glucidique : la méthode "sleep low"

Périodisation de l'apport glucidique : la méthode "sleep low"

Une des voies de recherche actuelle dans la recherche pour l'amélioration des performances en endurance est la périodisation des prises de glucides. L'une de ces méthode est appelée "sleep low".

Une des voies de recherche actuelle dans la recherche pour l'amélioration des performances en endurance est la périodisation des prises de glucides. Le but est de modifier les horaires de prise de glucides dans le but de créer des adaptations physiologiques favorables l'endurance.

Une des méthodes de périodisation est celle dite du "train low, compete high" dont je vous ai déjà parlé dans un article précédent. Une autre méthode dénommée "sleep low" a elle, aussi, été testée récemment (1).

3 semaines de "sleep low"

Cette méthode se déroule sur deux jours consécutifs. Il s'agit de faire l'après-midi du premier jour une séance d'entraînement à haute intensité (en fractionné) puis de se priver de glucides jusqu'à la séance suivante, au matin du deuxième jour.

Cette deuxième séance réalisée en endurance est alors effectuée en restriction de glucides exogènes et endogènes ("low glycogen") dans le but de favoriser les adaptations physiologiques profitables à l'endurance. Rappelons que certaines adaptations se font grâce à la baisse du glycogène musculaire (capacités mitochondriales, capacités à utiliser les lipides ou encore à stocker les glucides sous forme de glycogène musculaire).

Pour cette étude française, les chercheurs ont recruté 21 triathlètes (58.7 ml/kg/mn de VO2 max en moyenne) qu'ils ont répartis en deux groupes (un groupe "sleep low" et un groupe contrôle). Durant 3 semaines, les deux groupes suivaient le même entraînement et ingéraient des rations alimentaires similaires. Si la quantité totale quotidienne de glucides était identique (6 g/kg/j), seule la périodisation des prises de glucides différait. Le groupe contrôle effectuait donc toutes ses séances d'entraînement sans restriction glucidique. Le groupe "sleep low" effectuaient ses séances en endurance le matin en restriction glucidique et ses séances du soir à haute intensité tout en disposant des glucides nécessaires pour une séance de qualité.

Quels sont les résultats de cette étude ?

Le rendement delta à vélo (pourcentage d'énergie produite réellement destinée au mouvement) était augmenté de 11% dans le groupe "sleep low" contre seulement 1.4 % dans le groupe contrôle.

A vélo, le temps jusqu'à épuisement à 150% de PMA était augmenté de 12.5 % par la périodisation des apports de glucides selon la méthode "sleep low" contre seulement +1.63% dans le groupe contrôle.

La masse grasse était, quant à elle, diminuée dans le groupe "sleep low" (-8.5%) et dans le groupe contrôle (- 2.6%).

Enfin, la performance sur 10 km en course à pied était améliorée dans le groupe "sleep low" avec 2.9% de temps gagné contre -0.1% dans le groupe contrôle.

Effets aigus de la méthode "sleep low"

Ces résultats semblent tout à fait prometteurs et confortent les résultats d'une autre étude publiée un peu plus tôt en 2015 sur les adaptations aiguës d'une telle manipulation alimentaire. Pour cela 7 cyclistes de haut niveau (67 ml/kg/mn de VO2 max en moyenne) avaient réalisé deux tests en ordre aléatoire en suivant un protocole similaire (haute intensité le soir et 2 h en endurance le lendemain matin). Quel que soit le protocole testé, les cyclistes ingéraient 8 g/kg de glucides par jour (ainsi que 1.5 g/kg de protéines et 1.5 g/kg de lipides), seule la périodisation différait. Mais, lors du protocole "sleep low" les cyclistes ingéraient 8 g/kg de glucides avant l'entraînement du soir (6g/kg sur le début de la journée et 2 g/kg avant l'entraînement) puis restaient à jeun jusqu'à la séance du lendemain matin. Lors du protocole contrôle, les cyclistes ingéraient 4g/kg de glucides avant l'entraînement du soir (2 g/kg sur le début de la journée puis 2 g/kg avant l'entraînement) et 4g/kg après l'entraînement et avant le coucher. Ils réalisaient, aussi, leur séance matinale en endurance à jeun.

Qu'ont montré les analyses ?

Evidement, les stocks musculaires de glycogène après la séance à haute intensité étaient plus importants lors du protocole contrôle que lors du protocole "sleep low".

Les chercheurs avaient alors remarqué que retarder ainsi l'apport glucidique après un effort intense de façon à dormir avec peu de glucides stimulait l'expression de gènes favorisant la consommation lipidique le lendemain matin. Lors d'un effort débuté après une telle manipulation la consommation lipidique sera majorée. En revanche, aucune modification de la capacité mitochondriale n'a été constatée.

En conclusion

Au fur et à mesure, les diverses méthodes de périodisation de l'apport glucidique révèlent leurs potentiels bénéfices pour la performance en endurance. Leur avantage est d'approcher les adaptations d'un régime hypoglucidique ou "low carb" sans en garder les défauts (perte des capacités à consommer les glucides, fatigue, baisse des capacités de vitesse).

Ce protocole "sleep low" se veut prometteur. Cependant, sa mise en pratique demeure peu aisée pour la plupart d'entre nous puisqu'il faut disposer de deux jours consécutifs et avec des séances fixes sans trop de flexibilité.
 

J'ai testé…

Etape 1 : Première séance le soir avec une sortie VMA en course à pied (2x7x400m à VMA).

Etape 2 : Un repas de fruits de mer le soir avec une sauce Aïoli maison au curcuma riche en omégas 3 (recette dans "Assiette de l'endurance").

Etape 3 : Le lendemain matin, à jeun (juste un thé), séance de vélo en endurance sur home-trainer (1h).
 

 

Mon ressenti : 

Une grosse séance de fractionné (comme on peut en trouver dans "Paléofit" mais on peut aussi y trouver des plus accessibles) qui a probablement rempli son office et bien vidé mon glycogène musuclaire. Merci Karim pour m'avoir soutenu, motivé et tracté lors de la séance.

Un repas qui ne m'a pas laissé sur ma faim même si j'ai un peu rêvé du petit déjeuner durant la nuit !

La séance à jeun le matin fut difficile et il m'etait impossible d'accélérer réellement mais la séance s'est bien passée tout de même. 

Maintenant que j'ai franchi le cap et essayé cette méthode je suis prêt à recommencer régulièrement (si mon emloi du temps le permet) en alternant avec les séances en "low glycogen" sur une journée. 

 

(1) Marquet LA, Brisswalter J, Louis J, Tiollier E, Burke LM, Hawley JA, Hausswirth C. Enhanced Endurance Performance by Periodization of CHO Intake: "Sleep Low" Strategy. Med Sci Sports Exerc. 2016 Jan 7.

(2) Lane SC, Camera DM, Lassiter DG, Areta JL, Bird SR, Yeo WK, Jeacocke NA, Krook A, Zierath JR, Burke LM, Hawley JA. Effects of sleeping with reduced carbohydrate availability on acute training responses. J Appl Physiol (1985). 2015 Sep 15;119(6):643-55. 

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à propos de l'auteur

Le Dr Fabrice Kuhn est médecin généraliste, diplômé en biologie et médecine du sport. Il est médecin des équipes de France d'haltérophilie. Il pratique le triathlon ironman, le marathon et l'ultratrail.

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